Les fleurs, la nature-morte, le paysage, autant de prétextes pris par Alice Martinez pour dire sa familiarité avec les choses, et son accord avec l'ordre dont elles lui semblent témoigner.
Jean-Louis Audin, critique d'art (1950)
Vers 1947 - Huile sur toile - 65 x 81 cm
A Draveil dans la cabane de vannier qu'Antoine Martinez a transformée en atelier, au milieu d'un carré de luzerne et de curieuses fleurs en velours grenat dont nul ne peut me dire le nom, il y a place pour deux peintres : le second est Alice Martinez-Richter.
A quelqu'un qui demandait pourquoi les femmes ne sont pas nombreuses dans les arts, pourquoi nous n'avons eu qu'une Suzanne Valadon, pourquoi nous n'avons qu'une Colette... un père de famille répondait que "c'est une question de temps". Il avait raison : nos sœurs sont trop occupées de donner le jour, d'entretenir la flamme et de laver les morts, elles n'ont pas le temps...
Alice Martinez-Richter est l'exception : elle trouve le temps de tout faire - y compris de l'excellente peinture ; et pourtant quelle activité est la sienne ! un mari, deux enfants, une maison à tenir, un cours de dessin... il faut vraiment qu'elle ait le feu sacré et une énergie peu commune...
Rien de "féminin" d'ailleurs dans ses toiles. Entendez : rien de mièvre.
Alice Martinez répugne à l'idée que l'art puisse être un passe-temps ; cette jeune femme équilibrée, décidée, robuste, qui lâche l'aspirateur pour la motocyclette et la motocyclette pour le pinceau, s'exprime et ne s'amuse point.
Ce qu'elle a à exprimer, c'est une grande et calme force de vivante, le monde est solide et beau pour elle. On y peut vivre heureux. Du limon originel sont sortis des êtres frustres et gauches qui n'ont pas tardé à se perfectionner, à devenir harmonieux et agiles. Adam et Eve ont beau être mal équarris (si mal qu'ils firent scandale au dernier Salon des Femmes peintres), l'anatomie de leurs descendants est d'une bien remarquable plénitude. Je n'en veux pour exemple que les deux amies - toute grâce et volupté - absorbées dans leur commune Toilette.
Les fleurs, la nature-morte, le paysage, autant de prétextes pris par Alice Martinez pour dire sa familiarité avec les choses, et son accord avec l'ordre dont elles lui semblent témoigner. Cet ordre est musical autant que plastique : il y a une rythmique dans la composition de tel bouquet, dont les tiges dessinent de savantes modulations dans des cantons ordinairement réservés aux fonds et utilités... /...
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